La stratégie britannique au Moyen-Orient. Les constances et inconstances d'un Etat post-impérial
Les Britanniques donnent aujourd'hui des signes d'affaiblissement sur l'échiquier moyen-oriental. L'acquiescement par Londres à la vision américaine des relations internationales s'est en effet doublé d'un investissement physique de sa part au bénéfice de l'hyperpuissance. Cette stratégie assumée se maintiendra-t-elle à l'avenir ? Probablement, tant les modèles alternatifs attrayants pour une Grande-Bretagne en quête de la consolidation de ses atouts post-impériaux restent déficients.
Depuis les attentats du 11 Septembre, Londres n'a jamais manqué d'insister sur sa pleine adhésion à la vision développée par les Etats-Unis vis-à-vis des évolutions politiques planétaires. Il convient d'ailleurs, sur cette question comme sur d'autres, de parler d'une relation symbiotique liant Londres à Washington bien plus que d'hypothétiques accointances circonstancielles qu'auraient décidé d'entretenir les leaders actuels de ces deux pays dans le cadre de leur " guerre contre le terrorisme ". La special relationship dont se prévalent Américains et Britanniques remonte en effet à 1946, et il convient de remarquer que le tandem Bush-Blair n'a rien d'inédit en soi pour qui se remémore notamment la nature des liens par lesquels s'étaient déjà singularisés, un quart de siècle plus tôt, Ronald Reagan et Margaret Thatcher. Il y a pourtant une différence de taille entre ces deux périodes. En effet, alors que la Dame de Fer avait trouvé dans ses fortes affinités pro-américaines un moyen efficace pour consolider les intérêts stratégiques de l'ancienne Couronne britannique, Tony Blair prendra pour sa part le risque - assumé - d'une adhésion pavlovienne aux conceptions américaines du monde, quitte à ce que cela lui vaille le qualificatif peu amène de poodle (caniche). Ce début de troisième millénaire induit-il ainsi l'attachement de Londres à la consolidation d'un " axe anglo-saxon " par intermédiaire des États-Unis ? L'ancienne Albion aspire-t-elle, dans cette logique, à la revivification d'une gloire déchue ? Ou bien ces choix britanniques particuliers tombent-ils, bien au contraire, dans le droit fil d'une politique calibrée en fonction des impératifs stratégiques du pays ? Ces questions méritent d'être posées, à un moment où l'on ne manquera pas de constater que la lunette américaine adoptée par T. Blair pour la lecture des enjeux internationaux se sera doublée d'un suivisme politique, source de bien des désagréments. Rien ne permet ainsi d'affirmer que l'affaire des marins britanniques qui a éclaté à la fin du mois de mars 2007 restera la dernière des contraintes s'imposant à un Royaume-Uni nécessairement fragilisé dans sa politique moyen-orientale
LES BRITANNIQUES DANS L'HISTOIRE DU MOYEN-ORIENT
Les temps ne sont pourtant pas si lointains où la Perfide Albion jouissait d'un leadership solide au Moyen-Orient en général, et au Proche-Orient en particulier. Avec les campagnes de Napoléon Bonaparte de l798, ce sont les Britanniques qui opteront pour une concurrence active vis-à-vis des intérêts sollicités par les Français dans la région. Cette mise en confrontation connaîtra le plus souvent des manifestations de type indirect. Révélatrice parmi d'autres de cet aspect, la décision prise par le gouvernement du Premier ministre britannique Benjamin Disraeli, en l875, d'entrer dans le capital de la Compagnie du canal de Suez. Ce dernier ne faisait que rebondir sur la volonté du khédive Ismaël d'Égypte de vendre les actions qu'il y détenait, aux côtés des Français, en raison de contraintes financières. Londres trouvait pour sa part un moyen d'affirmer sa présence au niveau d'un point de passage fondamental pour ses intérêts commerciaux, et confirmera d' ailleurs cette donne en occupant le pays sept ans plus tard. Certes, les accords de Sykes-Picot (1916), que confirmeront les accords de San Remo (1920), permettront aux Britanniques de mettre sous protectorat l'Irak et la Palestine, les Français obtenant pour leur part un mandat sur la Syrie et le Liban. Mais il faut constater que c'est l'Égypte, pays à l'intérêt stratégique certain, qui sera finalement le cercueil des ambitions européennes dans l'ensemble du Moyen-Orient. En 1956 en effet, la décision du président égyptien Nasser de nationaliser le canal de Suez poussera les Français et les Britanniques à mettre en place une stratégie de récupération de " leurs " intérêts. La guerre israélo-égyptienne de 1956, voulue et planifiée par les deux ex-puissances mandataires, n'échappera pas à l' œil attentif de Washington, acteur alors en pleine redéfinition de ses options stratégiques moyen-orientales. L'entrée des troupes françaises et britanniques en Égypte, dont le motif officiel était une volonté de séparation des belligérants israélien et égyptien, ne leur permettra donc pas de procéder à une mainmise sur le canal de Suez, des menaces américaines et russes poussant vite les deux puissances européennes à plier bagage. C'est à leurs positions dans l'ensemble de la région qu'elles devront dès lors renoncer, même si l'ancienne Couronne pourra attendre les années 1960-1970 avant que d'octroyer leur indépendance aux micro-États du Golfe, derniers de leurs protectorats moyen- orientaux.
LONDRES ET LES EFFORTS DE GUERRE AMÉRICAINS
Mais, cinquante ans après la faillite de leurs entreprises impérialistes, les Britanniques seraient-ils confrontés aux limites de leur histoire post-impériale ? Une telle perspective aurait cela de grave qu'elle pousserait ipso facto Londres à connaître une nouvelle mise à mal de ses intérêts au Moyen-Orient. L'ancienne Couronne avait en effet, perspectives économiques mises à part, mis entre parenthèses ses ambitions dans la région pendant de longues années. Elle y reviendra par l'intermédiaire de Washington. Ce seront la guerre du Golfe de 1991, les bombardements de positions militaires et de bâtiments officiels irakiens en décembre 1998, et surtout la participation à l'invasion de l'Afghanistan en octobre 2001 puis de l'Irak en mars 2003. L'on peine, bien entendu, à expliquer l'ensemble de ces évènements par une stratégie britannique supposément autonome. Certes, la guerre du Golfe de 1991 trouvait tout son sens à la lumière du droit international, Saddam Hussein s'étant rendu coupable en août 1990 d'une occupation franche de son voisin koweïtien indépendant. De même, le renversement du régime des talibans dans la foulée des attentats du 11 Septembre avait fait l'objet d'un consentement onusien qui pouvait d'ailleurs trouver pleine légitimité au vu des accointances entretenues entre le régime islamiste et le leader d' Al-Qaida, Oussama ben Laden. Mais les cas des bombardements en Irak de 1998, et surtout de l'invasion du pays en mars 2003, suscitent beaucoup plus d'interrogations. Londres a en effet pour avantage, contrairement à Washington, d'être fort d'une bonne connaissance du terrain moyen-oriental qui puise dans la longue expérience coloniale qu'il y développait naguère. Qui plus est, l'Irak, ancien mandat britannique, répond à des spécificités sociologiques que ses anciens " protecteurs " sont bien loin d' avoir pu ignorer. En ce sens, les évolutions intervenues sur le terrain irakien ces quatre dernières années avaient un caractère largement prévisible. Une logique d' ailleurs similaire, quoique moins évidente, peut être trouvée dans le cas de l' Afghanistan, pays que la Couronne avait déjà largement approché au long du XIX' siècle, du temps où prévalait son attachement à la théorie du " grand jeu ". Le développement par le Royaume-Uni d'un atlantisme inconditionnel s'explique-t-il dès lors autrement qu'à travers un attachement à la sanctification de ses relations avec les États-Unis ? Le peu de crédit qu'accordent les Britanniques à l'idée d'un rôle prometteur pour l'Union européenne est notoire. Mais dans le même temps, la contrepartie faite dès lors aux Américains donne l'impression de la mise entre parenthèses par Londres de toute réflexion personnelle sur les enjeux moyen-orientaux contemporains. Les Britanniques semblent avoir opté pour un suivisme aveugle de l'hyperpuissance planétaire, synonyme pour eux de prestige, ainsi que de retombées bénéfiques pour ce qui relève des marchés acquis par Washington. La participation de Londres aux efforts de guerre américains, qui passe par la présence de quelque 6000 hommes en Afghanistan et 8000 hommes en Irak, reste bien moins importante en nombre que celle des États-Unis. Mais elle est suffisante pour prouver la loyauté des Britanniques à leur " allié " américain. Cette forte contiguïté peut-elle connaître une profonde remise en question dans les prochains temps, si toutefois les ambitions moyen-orientales américaines venaient à prendre des proportions aux conséquences rédhibitoires pour Londres ?
DILEMMES BRITANNIQUES
Les Britanniques font de moins en moins secret de leur intention de retirer leur contingent en place en Irak. Cependant, on notera aussi le fait qu'ils n'ont pas fixé clairement le terme d'un tel retrait, ce qui leur permet dans l'intervalle de faire valoir leur attachement à ne pas laisser l'Irak laissé à son propre sort. Tout retrait précipité de leur part serait en effet synonyme d'échec pour leur aventure irakienne. Or, à y regarder de plus près, les faits ne trompent pas : Londres est bien moins insistant quant à sa volonté de se retirer de l'Afghanistan, pays dans lequel il s'était pourtant engagé bien plus tôt. Les contraintes afghanes, en termes politiques et sécuritaires, ne sont en effet pas aussi dramatiques que celles qui prévalent en Irak. A partir de là, c'est la conscience qu'ont aujourd'hui les Britanniques de l'extrême sensibilité liée à leur occupation de l'ancienne Mésopotamie qui les contraint d'insister sur les motifs " positifs " de leur présence. Un message adressé aussi bien aux Irakiens, invités par là à infléchir la portée de leurs contestations anti-coalition, qu'aux États-Unis, que Londres ne voudrait cependant pas offusquer directement.
Les temps ne sont cependant plus favorables à la perpétuation par les Britanniques d'une stratégie irakienne esquissée par les seuls Américains. Très révélatrice, sur ce plan, fut la prise d'otages britanniques perpétrée par les Gardiens de la Révolution iraniens dans les eaux du Chatt al-Arab, à la fin mars 2007. Dès le dénouement de cette affaire, des rumeurs firent état d'options militaires auxquelles Washington aurait été favorable en représailles à l'action iranienne. Londres a-t-il réellement rejeté cette option ? Avait-il, de même, demandé préalablement aux Américains de mettre en sourdine leurs déclarations au sujet de cette prise d'otages afin d'éviter de radicaliser Téhéran ? Sans pouvoir rien affirmer pour l'heure face à ces hypothèses, on notera cependant que les Britanniques se retrouvent par là dans une situation extrêmement inconfortable pour leurs intérêts. C'est en effet le talon d' Achille de la coalition engagée en Irak que les Iraniens ont touché en emprisonnant les quinze soldats britanniques. Les contestations de l'opinion publique britannique vont grandissant devant le maintien par T. Blair d'un contingent en Irak, tant le bien-fondé de l'invasion du pays manque, aujourd'hui encore, de preuves probantes. La manière par laquelle le gouvernement essaiera d'exploiter à son profit les déclarations contradictoires prononcées par les anciens otages dès leur retour dans leur pays s'apparentera d'ailleurs elle-même à une tentative d'occultation par Londres de l'incapacité qu'il y eu pour lui à garantir la libération de ses ressortissants autrement que par le recours à des canaux diplomatiques aux contours sibyllins ainsi que par la sollicitation des efforts de maints pays plus en phase avec Téhéran, dont la Turquie. En vain, semble-t-il.
T. Blair pourrait-il cependant en venir à lâcher, tôt ou tard, les États-Unis en Irak ? Difficile à prévoir, cette hypothèse ne semble néanmoins pas à l'ordre du jour. Délaisser Washington impliquerait en effet d'avoir mûri au préalable une stratégie alternative garantissant la préservation des intérêts stratégiques britanniques. Or Londres, qui est d'ailleurs loin de prétendre à l'autonomie politique et stratégique, ne semble en rien à la veille de l'inscription de ses prérogatives et aspirations au bénéfice de l'action d'un acteur autre, tel que l'UE. De même, une fusion des perspectives stratégiques britanniques avec les orientations russes, voire chinoises, étant hautement improbable, c'est finalement le manque de scenarii du futur fiables qui contraint les Britanniques à s'en tenir aux modalités constitutives de leur diplomatie et de leurs orientations militaires du moment : les États- Unis comme référent et parrain incontournable des actions du royaume ; l'UE comme moyen pour l'" asseoiement " de certaines sollicitations diplomatiques britanniques, telles les négociations sur le nucléaire iranien. Ces deux fondements devraient continuer à participer des constantes diplomatiques du pays pour les prochaines années, et donc au-delà du départ de T. Blair prévu pour septembre 2007. Bien entendu, on voit mal Londres pouvoir répondre, dans l'immédiat, à une sollicitation américaine visant par exemple l'ouverture d'un nouveau front militaire moyen-oriental. Bien au contraire, c'est son esquisse d'une porte de sortie irakienne honorable qui, depuis longtemps recherchée, semble de surcroît ne plus être entièrement étrangère aux préoccupations américaines. Cependant, Londres ne croyant que peu à des alternatives fiables au poids américain dans le monde, ce n'est a priori que le jour où apparaîtront les signes concrets de l'entrée des États-Unis dans leur propre phase historique post-impériale que les Britanniques pourraient en venir à modifier la nature de leurs alliances. Et, une fois de plus, il reste à voir si l'UE aura réussi, dans cet intervalle, à se rendre indispensable aux yeux de Londres. Ce qui, pour l'heure, reste loin d'être acquis.
Barah Mikaïl Chercheur à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS). Auteur de La Politique américaine au Moyen-Orient (Dalloz, 2006).
Barah Mikaïl / L’Essentiel des relations internationales / mai-juin 2007
Source: INSTITUT DE RELATIONS INTERNATIONALES ET STRATEGIQUES
http://www.iris-france.org/Tribunes-2007-05-16.php3
lundi 4 juin 2007
Relations Internationales: Cold War part two.... ou l'apologie d'une future serie B ratee
Bouclier antimissile : Vladimir Poutine agite le spectre de la guerre froide
ladimir Poutine a franchi un cran supplémentaire dans la rhétorique agressive envers les Etats-Unis, en menaçant de pointer de nouveau les missiles russes - qui, en principe, ne le sont plus depuis la fin de la guerre froide -, sur des "cibles en Europe" si les Etats-Unis mettent à exécution leur projet d'installer des sites antimissiles en Pologne et en République tchèque. Le président russe a tenu ces propos lors d'un entretien publié lundi 4 juin par huit journaux représentant les pays du G8, dont le sommet se tiendra en Allemagne en fin de semaine.
Les propos de M. Poutine sont cependant ambigus, puisque cette menace repose sur un amalgame entre le bouclier antimissile et les forces nucléaires américaines. "Lorsque le système antimissile sera installé, il fonctionnera en liaison automatique avec le dispositif nucléaire des Etats-Unis, explique-t-il. Pour la première fois dans l'histoire, il y aura donc en Europe des éléments d'un système nucléaire américain. Cela change fondamentalement l'équilibre du système international." Nous devrons trouver une réponse, poursuit-il : "Bien sûr, nous devrons avoir des cibles en Europe. Quels moyens utiliserons-nous ? Des missiles balistiques, des missiles de croisière ou de nouveaux systèmes d'armement, c'est une question technique."
Alors que des généraux russes avaient déjà évoqué la possibilité de frappes contre les futurs sites polonais et tchèque, c'est la première fois que le président russe brandit lui-même cette menace. Le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a cependant dissipé toute ambiguïté, dimanche, en expliquant dans une interview diffusée sur la chaîne de télévision Vesti 24 que son pays serait obligé de "supprimer les menaces potentielles résultant de ce déploiement" de missiles.
Le chef de la diplomatie russe a toutefois esquissé une ouverture : "Il vaudrait mieux reprendre le travail dans le cadre du Conseil OTAN-Russie sur la création d'un grand théâtre de défense antimissile", a-t-il indiqué.
Cette escalade verbale russe est liée à la fermeté de la position de l'administration Bush qui, tout en répétant que son bouclier antimissile ne menace en rien la Russie (il est officiellement conçu pour annihiler une menace balistique iranienne), rappelle que les protestations de Moscou ne changeront rien à sa détermination de concrétiser le projet d'installer 10 missiles intercepteurs en Pologne, et un radar en République tchèque.
Une semaine avant le G8, où ce sujet sera abordé, et alors que le président George Bush était attendu lundi soir à Prague pour discuter du bouclier, M. Poutine fait monter les enchères : "Nous savons que cela risque de relancer la course aux armements mais nous n'en serons pas responsables. Ce n'est pas nous qui avons commencé à remettre en cause l'équilibre stratégique."
Le lien établi par M. Poutine entre les forces nucléaires américaines et le bouclier antimissile est contestable, puisque les missiles intercepteurs ne seront armés d'aucune charge nucléaire. Ils utilisent une technique qui détruit le missile adverse par simple énergie cinétique. Mais M. Poutine n'a pas tout à fait tort non plus : le radar installé en République tchèque serait relié aux radars de Fylingdales (Angleterre), Vardo (Norvège) et Thulé (Groënland), qui font partie des systèmes d'alerte avancée des forces stratégiques américaines.
Au-delà des explications techniques, le fait politique est que la condamnation des ambitions des Etats-Unis a repris droit de cité en Russie où il ne se passe pas un jour sans que M. Poutine ne se lance dans une diatribe contre "l'impérialisme".
Marie Jégo (à Moscou) et Laurent Zecchini
Source:LE MONDE | 04.06.07 | 13h59 • Mis à jour le 04.06.07 | 18h58
ladimir Poutine a franchi un cran supplémentaire dans la rhétorique agressive envers les Etats-Unis, en menaçant de pointer de nouveau les missiles russes - qui, en principe, ne le sont plus depuis la fin de la guerre froide -, sur des "cibles en Europe" si les Etats-Unis mettent à exécution leur projet d'installer des sites antimissiles en Pologne et en République tchèque. Le président russe a tenu ces propos lors d'un entretien publié lundi 4 juin par huit journaux représentant les pays du G8, dont le sommet se tiendra en Allemagne en fin de semaine.
Les propos de M. Poutine sont cependant ambigus, puisque cette menace repose sur un amalgame entre le bouclier antimissile et les forces nucléaires américaines. "Lorsque le système antimissile sera installé, il fonctionnera en liaison automatique avec le dispositif nucléaire des Etats-Unis, explique-t-il. Pour la première fois dans l'histoire, il y aura donc en Europe des éléments d'un système nucléaire américain. Cela change fondamentalement l'équilibre du système international." Nous devrons trouver une réponse, poursuit-il : "Bien sûr, nous devrons avoir des cibles en Europe. Quels moyens utiliserons-nous ? Des missiles balistiques, des missiles de croisière ou de nouveaux systèmes d'armement, c'est une question technique."
Alors que des généraux russes avaient déjà évoqué la possibilité de frappes contre les futurs sites polonais et tchèque, c'est la première fois que le président russe brandit lui-même cette menace. Le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a cependant dissipé toute ambiguïté, dimanche, en expliquant dans une interview diffusée sur la chaîne de télévision Vesti 24 que son pays serait obligé de "supprimer les menaces potentielles résultant de ce déploiement" de missiles.
Le chef de la diplomatie russe a toutefois esquissé une ouverture : "Il vaudrait mieux reprendre le travail dans le cadre du Conseil OTAN-Russie sur la création d'un grand théâtre de défense antimissile", a-t-il indiqué.
Cette escalade verbale russe est liée à la fermeté de la position de l'administration Bush qui, tout en répétant que son bouclier antimissile ne menace en rien la Russie (il est officiellement conçu pour annihiler une menace balistique iranienne), rappelle que les protestations de Moscou ne changeront rien à sa détermination de concrétiser le projet d'installer 10 missiles intercepteurs en Pologne, et un radar en République tchèque.
Une semaine avant le G8, où ce sujet sera abordé, et alors que le président George Bush était attendu lundi soir à Prague pour discuter du bouclier, M. Poutine fait monter les enchères : "Nous savons que cela risque de relancer la course aux armements mais nous n'en serons pas responsables. Ce n'est pas nous qui avons commencé à remettre en cause l'équilibre stratégique."
Le lien établi par M. Poutine entre les forces nucléaires américaines et le bouclier antimissile est contestable, puisque les missiles intercepteurs ne seront armés d'aucune charge nucléaire. Ils utilisent une technique qui détruit le missile adverse par simple énergie cinétique. Mais M. Poutine n'a pas tout à fait tort non plus : le radar installé en République tchèque serait relié aux radars de Fylingdales (Angleterre), Vardo (Norvège) et Thulé (Groënland), qui font partie des systèmes d'alerte avancée des forces stratégiques américaines.
Au-delà des explications techniques, le fait politique est que la condamnation des ambitions des Etats-Unis a repris droit de cité en Russie où il ne se passe pas un jour sans que M. Poutine ne se lance dans une diatribe contre "l'impérialisme".
Marie Jégo (à Moscou) et Laurent Zecchini
Source:LE MONDE | 04.06.07 | 13h59 • Mis à jour le 04.06.07 | 18h58
vendredi 1 juin 2007
Relations Internationales: Le G8
Un G8 sous tension
a réunion ministérielle, mercredi 30 mai à Postdam, en préparation du sommet du G8 d'Heiligendamm, du 6 au 8 juin, sous présidence allemande, n'a fait que confirmer les tensions qui parcourent cette enceinte des grandes puissances industrialisées. Deux dossiers importants font l'objet de graves désaccords : celui de la lutte contre le réchauffement climatique, qui met aux prises les Etats-Unis et la chancelière allemande, Angela Merkel, qui en a fait l'une de ses priorités ; et celui du statut du Kosovo, la province albanophone que les Occidentaux voudraient faire accéder à un statut d'"indépendance surveillée", sans avoir réussi à emporter l'assentiment de la Russie. Moscou brandit la menace d'un veto au Conseil de sécurité de l'ONU.
Sur le Kosovo, une discussion tendue a opposé, à Potsdam, le ministre russe des affaires étrangères, Serguei Lavrov, et ses homologues américain et européens. Le
représentant russe a jugé que les positions étaient "diamétralement opposées", arguant que toute modification des frontières serait lourde de déstabilisation dans les Balkans, avec des conséquences possibles dans le Caucase.
La Russie a déployé ces derniers mois une rhétorique particulièrement offensive, face aux Etats-Unis, au sujet du bouclier antimissile en Europe, et ses relations avec les Européens se sont détériorées, notamment à l'occasion d'une dispute sur le déplacement d'un monument soviétique en Estonie. En comparaison avec le G8 de Saint-Pétersbourg en 2006, celui de Heiligendamm s'annonce comme une réunion à haute tension.
En invitant, le 30 mai, le président russe, Vladimir Poutine, à se rendre les 1er et 2 juillet dans sa résidence familiale à Kennebunkport, dans le Maine, le président américain tente une ouverture en direction d'un interlocuteur malcommode. Si elle est bienvenue, cette démarche intervient tardivement, alors que les contentieux se sont déjà accumulés, et que Washington a fait preuve de maladresse en poussant son avantage avec le bouclier antimissile, face à une Russie soucieuse d'apparaître comme un partenaire reconnu.
Le G8 sera un test pour Mme Merkel comme pour Nicolas Sarkozy. La chancelière allemande va devoir démontrer sa capacité à rapprocher les positions des Européens et des Etats-Unis sur la lutte contre le gaz à effets de serre, et à jouer les médiatrices avec la Russie. Quant au président français, il y aura sa première rencontre depuis son élection avec M. Bush. Les Etats-Unis ont "le devoir de ne pas faire obstacle à la lutte contre le réchauffement climatique", avait déclaré M. Sarkozy au soir du 6 mai. Le chef de l'Etat aura aussi à se positionner face à M. Poutine, dont il a fortement critiqué la politique lors de la campagne électorale. Un passage du discours aux actes.
Source: LE MONDE | 31.05.07 | 13h18
Article paru dans l'édition du 01.06.07
a réunion ministérielle, mercredi 30 mai à Postdam, en préparation du sommet du G8 d'Heiligendamm, du 6 au 8 juin, sous présidence allemande, n'a fait que confirmer les tensions qui parcourent cette enceinte des grandes puissances industrialisées. Deux dossiers importants font l'objet de graves désaccords : celui de la lutte contre le réchauffement climatique, qui met aux prises les Etats-Unis et la chancelière allemande, Angela Merkel, qui en a fait l'une de ses priorités ; et celui du statut du Kosovo, la province albanophone que les Occidentaux voudraient faire accéder à un statut d'"indépendance surveillée", sans avoir réussi à emporter l'assentiment de la Russie. Moscou brandit la menace d'un veto au Conseil de sécurité de l'ONU.
Sur le Kosovo, une discussion tendue a opposé, à Potsdam, le ministre russe des affaires étrangères, Serguei Lavrov, et ses homologues américain et européens. Le
représentant russe a jugé que les positions étaient "diamétralement opposées", arguant que toute modification des frontières serait lourde de déstabilisation dans les Balkans, avec des conséquences possibles dans le Caucase.
La Russie a déployé ces derniers mois une rhétorique particulièrement offensive, face aux Etats-Unis, au sujet du bouclier antimissile en Europe, et ses relations avec les Européens se sont détériorées, notamment à l'occasion d'une dispute sur le déplacement d'un monument soviétique en Estonie. En comparaison avec le G8 de Saint-Pétersbourg en 2006, celui de Heiligendamm s'annonce comme une réunion à haute tension.
En invitant, le 30 mai, le président russe, Vladimir Poutine, à se rendre les 1er et 2 juillet dans sa résidence familiale à Kennebunkport, dans le Maine, le président américain tente une ouverture en direction d'un interlocuteur malcommode. Si elle est bienvenue, cette démarche intervient tardivement, alors que les contentieux se sont déjà accumulés, et que Washington a fait preuve de maladresse en poussant son avantage avec le bouclier antimissile, face à une Russie soucieuse d'apparaître comme un partenaire reconnu.
Le G8 sera un test pour Mme Merkel comme pour Nicolas Sarkozy. La chancelière allemande va devoir démontrer sa capacité à rapprocher les positions des Européens et des Etats-Unis sur la lutte contre le gaz à effets de serre, et à jouer les médiatrices avec la Russie. Quant au président français, il y aura sa première rencontre depuis son élection avec M. Bush. Les Etats-Unis ont "le devoir de ne pas faire obstacle à la lutte contre le réchauffement climatique", avait déclaré M. Sarkozy au soir du 6 mai. Le chef de l'Etat aura aussi à se positionner face à M. Poutine, dont il a fortement critiqué la politique lors de la campagne électorale. Un passage du discours aux actes.
Source: LE MONDE | 31.05.07 | 13h18
Article paru dans l'édition du 01.06.07
Inde: Usine a cerveaux ?
L'Inde, la revanche du capital humain, par Eric Le Boucher
otre enfant est bac + 5, ingénieur, technicien, informaticien, et il n'a pas de boulot dans la France de Chirac ? Qu'il parte en Inde. Le système éducatif y est dépassé par l'expansion fulgurante du secteur des hautes technologies. Les salaires des programmeurs montent de 13 % l'an (actuellement 6 600 dollars par an en moyenne) et ceux des responsables de projet de 23 % (déjà 31 000 dollars). Selon le cabinet américain McKinsey, l'Inde va souffrir d'une pénurie de 500 000 professionnels qualifiés d'ici à 2010. Les services informatiques, la clé du réveil de l'Inde, représentent 4 % de son PIB (produit intérieur brut) et emploient 695 000 personnes. Ils devraient doubler d'ici à la fin de la décennie pour peser 7 % du PIB et employer 1,5 million de personnes. A condition que la pénurie ne vienne pas freiner cette expansion.
On dit, à Bengalore, dans la Silicon Valley du sud du pays, que de premiers jeunes Anglais se seraient laissé tenter par l'aventure. Avec un revenu de 1 000 dollars, ils vont presque vivre comme des nababs. Et l'avenir n'est-il pas là ? On croit rêver : l'Inde devenue terre d'émigration dans les hautes qualifications...
Aller du centre-ville de Bengalore jusqu'à la zone spéciale où sont installées Infosys, Wipro, TCS et les autres championnes de la Shining India (l'Inde qui brille) est une expérience. Routes défoncées, embouteillages monstres de rickshaws, de cars déglingués et de voitures, alignements de taudis avec leurs petites boutiques de nourriture aux mille couleurs et de bric-à-brac rouillé, vaches poussiéreuses indifférentes à la pollution envahissante, la pauvreté indienne vous prend au coeur. Puis elle s'arrête net pour laisser place à un "campus" de verdure et de bâtiments de verre, propres et fonctionnels comme à Palo Alto. Le gouffre entre l'Inde loqueteuse et celle qui rivalise avec les meilleures multinationales n'a jamais été aussi immense.
Depuis 1991, date du début des réformes et de l'entrée dans la mondialisation, l'économie indienne a doublé. Trente-cinq millions d'Indiens ont atteint un niveau de revenu bientôt comparable à celui des pays développés (1 000 dollars par mois). Cette classe moyenne en expansion rapide (+10% l'an) vit côte à côte avec 400 millions de miséreux (moins de 1 dollar par jour), chiffre grosso modo stable.
Cette coexistence eût paru, il y a encore dix ans, explosive. Elle ne l'est pas. Pourquoi ?
L'hypothèse serait celle-ci : la démographie ne s'oppose plus à l'économie. Les géants économiques de demain ont pour nom Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud. Dans la mondialisation, le capital humain est le premier avantage comparatif. Une main-d'oeuvre éduquée, en bonne santé, volontaire pour travailler et s'enrichir, est le rêve des patrons. Si l'Inde a souffert de faible croissance de 1947 (l'indépendance) aux années 1990, ce serait moins à cause de sa surpopulation qui la ruinait que de "l'alliance passée entre l'intelligentsia, les milieux d'affaires et les propriétaires fonciers (...) où chacun trouvait son compte dans le clientélisme et le conservatisme", comme l'explique Christophe Jaffrelot ("La démocratie à l'indienne", revue Le Débat, novembre-décembre).
La rupture s'est produite en misant sur le capital humain que représentent les jeunes diplômés parlant anglais et en ouvrant l'économie. La croissance atteindra 7 % cette année, pas loin de la performance chinoise.
Quand les économies étaient fermées, faire naître des enfants était considéré comme une catastrophe. Le contenu de l'assiette, comme le travail, allait devoir être partagé. Dans la mondialisation, cette vision malthusienne devrait perdre ses derniers adeptes. Pour les économistes de Goldman Sachs, c'est parce que l'Inde a laissé la liberté de procréation aux parents (à quelques exceptions régionales près) que le pays va pouvoir croître de 5 % l'an jusqu'au milieu du siècle, quand la Chine de l'enfant unique verra sa croissance ralentir à partir de 2020 sous le coup d'un vieillissement accéléré. La moyenne d'âge des Indiens sera alors de 29 ans, contre 37 ans en Chine et 45 ans en Europe de l'Ouest.
2,5 MILLIONS DE DIPLÔMÉS CHAQUE ANNÉE
Si l'abondance de la population ne constitue plus un blocage du développement, au contraire, la main-d'oeuvre doit être formée. L'efficience des systèmes éducatifs devient le facteur-clé, c'est là que se joue la compétition mondiale. Au niveau supérieur des Zidane de l'informatique ou de la banque, la guerre des cerveaux est déclarée, mais les comparaisons pays à pays sont permanentes à tous les niveaux.
Dans ce cadre, l'Inde a profité de son effort passé d'éducation. Mais, comme le montre l'exemple des services informatiques, l'avenir n'est pas garanti. Les universités indiennes fabriquent 2,5 millions de diplômés chaque année, mais seulement un quart serait de qualité suffisante, selon McKinsey. En outre, une partie quitte le pays pour les Etats-Unis ou l'Europe. La poursuite de la croissance indienne a un autre goulet d'étranglement, le manque d'autoroutes, d'aéroports, de trains, de centrales électriques ou de stations d'épuration d'eau. Le défaut d'infrastructures provoque une congestion générale.
Mais la poursuite du succès de la Shining India repose d'abord sur l'offre sur le marché du travail, chaque année, de 15 millions de jeunes, formés, employables, ambitieux.
Source:
ÉRIC LE BOUCHER
Article paru dans l'édition du 18.12.05
LE MONDE | 17.12.05 | 15h11 • Mis à jour le 29.05.07 | 16h21
otre enfant est bac + 5, ingénieur, technicien, informaticien, et il n'a pas de boulot dans la France de Chirac ? Qu'il parte en Inde. Le système éducatif y est dépassé par l'expansion fulgurante du secteur des hautes technologies. Les salaires des programmeurs montent de 13 % l'an (actuellement 6 600 dollars par an en moyenne) et ceux des responsables de projet de 23 % (déjà 31 000 dollars). Selon le cabinet américain McKinsey, l'Inde va souffrir d'une pénurie de 500 000 professionnels qualifiés d'ici à 2010. Les services informatiques, la clé du réveil de l'Inde, représentent 4 % de son PIB (produit intérieur brut) et emploient 695 000 personnes. Ils devraient doubler d'ici à la fin de la décennie pour peser 7 % du PIB et employer 1,5 million de personnes. A condition que la pénurie ne vienne pas freiner cette expansion.
On dit, à Bengalore, dans la Silicon Valley du sud du pays, que de premiers jeunes Anglais se seraient laissé tenter par l'aventure. Avec un revenu de 1 000 dollars, ils vont presque vivre comme des nababs. Et l'avenir n'est-il pas là ? On croit rêver : l'Inde devenue terre d'émigration dans les hautes qualifications...
Aller du centre-ville de Bengalore jusqu'à la zone spéciale où sont installées Infosys, Wipro, TCS et les autres championnes de la Shining India (l'Inde qui brille) est une expérience. Routes défoncées, embouteillages monstres de rickshaws, de cars déglingués et de voitures, alignements de taudis avec leurs petites boutiques de nourriture aux mille couleurs et de bric-à-brac rouillé, vaches poussiéreuses indifférentes à la pollution envahissante, la pauvreté indienne vous prend au coeur. Puis elle s'arrête net pour laisser place à un "campus" de verdure et de bâtiments de verre, propres et fonctionnels comme à Palo Alto. Le gouffre entre l'Inde loqueteuse et celle qui rivalise avec les meilleures multinationales n'a jamais été aussi immense.
Depuis 1991, date du début des réformes et de l'entrée dans la mondialisation, l'économie indienne a doublé. Trente-cinq millions d'Indiens ont atteint un niveau de revenu bientôt comparable à celui des pays développés (1 000 dollars par mois). Cette classe moyenne en expansion rapide (+10% l'an) vit côte à côte avec 400 millions de miséreux (moins de 1 dollar par jour), chiffre grosso modo stable.
Cette coexistence eût paru, il y a encore dix ans, explosive. Elle ne l'est pas. Pourquoi ?
L'hypothèse serait celle-ci : la démographie ne s'oppose plus à l'économie. Les géants économiques de demain ont pour nom Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud. Dans la mondialisation, le capital humain est le premier avantage comparatif. Une main-d'oeuvre éduquée, en bonne santé, volontaire pour travailler et s'enrichir, est le rêve des patrons. Si l'Inde a souffert de faible croissance de 1947 (l'indépendance) aux années 1990, ce serait moins à cause de sa surpopulation qui la ruinait que de "l'alliance passée entre l'intelligentsia, les milieux d'affaires et les propriétaires fonciers (...) où chacun trouvait son compte dans le clientélisme et le conservatisme", comme l'explique Christophe Jaffrelot ("La démocratie à l'indienne", revue Le Débat, novembre-décembre).
La rupture s'est produite en misant sur le capital humain que représentent les jeunes diplômés parlant anglais et en ouvrant l'économie. La croissance atteindra 7 % cette année, pas loin de la performance chinoise.
Quand les économies étaient fermées, faire naître des enfants était considéré comme une catastrophe. Le contenu de l'assiette, comme le travail, allait devoir être partagé. Dans la mondialisation, cette vision malthusienne devrait perdre ses derniers adeptes. Pour les économistes de Goldman Sachs, c'est parce que l'Inde a laissé la liberté de procréation aux parents (à quelques exceptions régionales près) que le pays va pouvoir croître de 5 % l'an jusqu'au milieu du siècle, quand la Chine de l'enfant unique verra sa croissance ralentir à partir de 2020 sous le coup d'un vieillissement accéléré. La moyenne d'âge des Indiens sera alors de 29 ans, contre 37 ans en Chine et 45 ans en Europe de l'Ouest.
2,5 MILLIONS DE DIPLÔMÉS CHAQUE ANNÉE
Si l'abondance de la population ne constitue plus un blocage du développement, au contraire, la main-d'oeuvre doit être formée. L'efficience des systèmes éducatifs devient le facteur-clé, c'est là que se joue la compétition mondiale. Au niveau supérieur des Zidane de l'informatique ou de la banque, la guerre des cerveaux est déclarée, mais les comparaisons pays à pays sont permanentes à tous les niveaux.
Dans ce cadre, l'Inde a profité de son effort passé d'éducation. Mais, comme le montre l'exemple des services informatiques, l'avenir n'est pas garanti. Les universités indiennes fabriquent 2,5 millions de diplômés chaque année, mais seulement un quart serait de qualité suffisante, selon McKinsey. En outre, une partie quitte le pays pour les Etats-Unis ou l'Europe. La poursuite de la croissance indienne a un autre goulet d'étranglement, le manque d'autoroutes, d'aéroports, de trains, de centrales électriques ou de stations d'épuration d'eau. Le défaut d'infrastructures provoque une congestion générale.
Mais la poursuite du succès de la Shining India repose d'abord sur l'offre sur le marché du travail, chaque année, de 15 millions de jeunes, formés, employables, ambitieux.
Source:
ÉRIC LE BOUCHER
Article paru dans l'édition du 18.12.05
LE MONDE | 17.12.05 | 15h11 • Mis à jour le 29.05.07 | 16h21
Inde: Toujours plus haut...
L'Inde enregistre une croissance record en 2006-2007
'économie indienne a progressé en 2006-2007 à un taux record de 9,4 % sur un an, soit mieux que les 9,2 % prévus. En 2005-2006, le PIB avait progressé de 9 %. Le géant asiatique conforte ainsi sa place de deuxième économie à la croissance la plus forte au monde, derrière la Chine.
Sans surprise, la croissance a été dopée par les services, la production industrielle (+ 11,3 %), et par le bond des investissements indiens à l'étranger (en 2007, ils devraient dépasser ceux des étrangers en Inde). L'industrie et les services représentent respectivement 25 et 55 % du PIB. La production agricole, qui pèse pour plus de 20 % du PIB et fait vivre les deux tiers du 1,1 milliard d'Indiens, progresse à un rythme bien plus lent.
UN RALENTISSEMENT EN PERSPECTIVE
Mais dans ce contexte euphorique, l'économie indienne, qui pèse 1 000 milliards de dollars, risque la surchauffe. La Banque centrale a plusieurs fois relevé ses taux d'intérêt pour tenter de juguler l'inflation, qui a atteint ces derniers mois un taux de près de 7 %. Depuis, elle est retombée au-dessus de 5 %.
S'attendant à de nouveaux resserrements monétaires, la banque JP Morgan prévoit une croissance de 8 % en 2007-2008. La Banque centrale table sur un taux de 8,5 % et le ministère des finances espère 9 %. "A l'avenir, la consommation locale pourrait ralentir tout comme les exportations. Nous avons de toute façon grossi trop vite ces derniers mois", a tempéré DK Joshi, de l'agence de notation Crisil, laquelle escompte un taux de croissance du PIB à 8,1 % en 2007-2008.
La quatrième économie d'Asie profite aussi de l'appétit insatiable de ses entreprises lancées sans complexe depuis un an à l'assaut de groupes étrangers. Les champions du sous-continent ont dépensé en 2006 le montant record de 23 milliards de dollars pour avaler des concurrents étrangers, soit cinq fois plus qu'en 2005. L'achat le plus spectaculaire reste celui en janvier du sidérurgiste anglo-néerlandais Corus par l'indien Tata Steel, pour 10,6 milliards d'euros, la plus grosse opération internationale jamais réalisée par un groupe indien.
Source: LEMONDE.FR avec AFP | 31.05.07 | 13h48 • Mis à jour le 31.05.07 | 14h14
'économie indienne a progressé en 2006-2007 à un taux record de 9,4 % sur un an, soit mieux que les 9,2 % prévus. En 2005-2006, le PIB avait progressé de 9 %. Le géant asiatique conforte ainsi sa place de deuxième économie à la croissance la plus forte au monde, derrière la Chine.
Sans surprise, la croissance a été dopée par les services, la production industrielle (+ 11,3 %), et par le bond des investissements indiens à l'étranger (en 2007, ils devraient dépasser ceux des étrangers en Inde). L'industrie et les services représentent respectivement 25 et 55 % du PIB. La production agricole, qui pèse pour plus de 20 % du PIB et fait vivre les deux tiers du 1,1 milliard d'Indiens, progresse à un rythme bien plus lent.
UN RALENTISSEMENT EN PERSPECTIVE
Mais dans ce contexte euphorique, l'économie indienne, qui pèse 1 000 milliards de dollars, risque la surchauffe. La Banque centrale a plusieurs fois relevé ses taux d'intérêt pour tenter de juguler l'inflation, qui a atteint ces derniers mois un taux de près de 7 %. Depuis, elle est retombée au-dessus de 5 %.
S'attendant à de nouveaux resserrements monétaires, la banque JP Morgan prévoit une croissance de 8 % en 2007-2008. La Banque centrale table sur un taux de 8,5 % et le ministère des finances espère 9 %. "A l'avenir, la consommation locale pourrait ralentir tout comme les exportations. Nous avons de toute façon grossi trop vite ces derniers mois", a tempéré DK Joshi, de l'agence de notation Crisil, laquelle escompte un taux de croissance du PIB à 8,1 % en 2007-2008.
La quatrième économie d'Asie profite aussi de l'appétit insatiable de ses entreprises lancées sans complexe depuis un an à l'assaut de groupes étrangers. Les champions du sous-continent ont dépensé en 2006 le montant record de 23 milliards de dollars pour avaler des concurrents étrangers, soit cinq fois plus qu'en 2005. L'achat le plus spectaculaire reste celui en janvier du sidérurgiste anglo-néerlandais Corus par l'indien Tata Steel, pour 10,6 milliards d'euros, la plus grosse opération internationale jamais réalisée par un groupe indien.
Source: LEMONDE.FR avec AFP | 31.05.07 | 13h48 • Mis à jour le 31.05.07 | 14h14
mardi 29 mai 2007
Cold War: Russia reminds old souvenir
Russia test-launches new missiles
MOSCOW: A senior Russian official said strategic and tactical missiles tested Tuesday can penetrate any missile defense system, Russian news agencies reported.
"As of today Russia has new (missiles) that are capable of overcoming any existing or future missile defense systems," ITAR-Tass quoted First Deputy Prime Minister Sergei Ivanov as saying. "So in terms of defense and security Russian can look calmly to the country's future."
Ivanov spoke after the Russian Strategic Missile Forces announced the test of a new intercontinental ballistic missile capable of carrying multiple independent warheads. He said Russia had also successfully tested a tactical cruise missile.
President Vladimir Putin and Ivanov, a former defense minister seen as a potential candidate to succeed Putin in elections next year, have repeatedly said Russia would continue to improve its nuclear weapons systems and respond to U.S. plans to deploy a missile defense system in Europe.
The ICBM, called the RS-24, was fired from a mobile launcher at the Plesetsk launch pad in northwestern Russia. Its test warhead landed on target some 5,500 kilometers (3,400 miles) away on the Far Eastern Kamchatka Peninsula, a statement from the Strategic Missile Forces said.
The new missile is seen as eventually replacing the aging RS-18s and RS-20s that are the backbone of the country's missile forces, the statement said. Those missiles are known in the West as the SS-19 Stiletto and the SS-18 Satan.
Ivanov said the missile was a new version of the Topol-M, first known as the SS-27 in the West, but one that that can carry multiple independent warheads, ITAR-Tass reported.
The first Topol-Ms were commissioned in 1997, but deployment has proceeded slower than planned because of a shortage of funds. Existing Topol-M missiles are capable of hitting targets more than 10,000 kilometers (6,000 miles) away.
The RS-24 "strengthens the capability of the attack groups of the Strategic Missile Forces by surmounting anti-missile defense systems, at the same time strengthening the potential for nuclear deterrence," the statement said.
The statement did not specify how many warheads the missile can carry.
The new missile would likely be more capable of penetrating missile defense systems than previous models, said Alexander Pikayev, an arms control expert and senior analyst at the Moscow-based Institute for World Economy and International Relations.
He said Russia had been working on a version of the Topol-M that could carry multiple warheads, and that its development was probably "inevitable" after the U.S. withdrew from the Soviet-era Anti-Ballistic Missile treaty in 2002, preventing the START-II treaty from coming into force.
Pikayev concurred with the missile forces statement that the RS-24 conforms with terms laid down in the START-I treaty, which is in force, and the 2002 Moscow Treaty, which calls for reductions in each country's nuclear arsenal to 1,700-2,000 warheads.
Alexander Golts, a respected military analyst with the Yezhenedelny Zhurnal online publication, expressed surprise at the announcement.
"It seems to be a brand new missile. It's either a decoy or something that has been developed in complete secrecy," he told The Associated Press.
The test comes at a time of increased tension between Russia and the West over missiles and other weapons issues.
Russia adamantly opposes U.S. efforts to deploy elements of a missile-defense system in Poland and the Czech Republic. The United States says the system is aimed at blocking possible attacks by countries such as North Korea and Iran, but Russia says the system would destroy the strategic balance of forces in Europe.
"We consider it harmful and dangerous to turn Europe into a powder keg," Putin said Tuesday, when asked at a news conference with Portuguese Prime Minister Jose Socrates about the controversy.
Russia, meanwhile, called Monday for an emergency conference next month on a key Soviet-era arms control treaty that has been a source of increasing friction between Moscow and NATO.
The call for a conference on the Conventional Forces in Europe Treaty follows last month's statement from Putin in which he declared a moratorium on observing Russia's obligations under the treaty.
The treaty, which limits the number of aircraft, tanks and other non-nuclear heavy weapons around Europe, was first signed in 1990 and then amended in 1999 to reflect changes since the Soviet breakup. Russia has ratified the amended version, but the United States and other NATO members have refused to do so until Moscow withdraws troops from the former Soviet republics of Moldova and Georgia — an issue Moscow says is unrelated.
Putin warned that Russia could dump the treaty altogether if Western nations refuse to ratify its amended version, and the Foreign Ministry said Monday that it lodged a formal request for a conference among treaty signatories in Vienna, Austria, on June 12-15.
Source: the International Herald Tribune - The Associated Press
Tuesday, May 29, 2007
MOSCOW: A senior Russian official said strategic and tactical missiles tested Tuesday can penetrate any missile defense system, Russian news agencies reported.
"As of today Russia has new (missiles) that are capable of overcoming any existing or future missile defense systems," ITAR-Tass quoted First Deputy Prime Minister Sergei Ivanov as saying. "So in terms of defense and security Russian can look calmly to the country's future."
Ivanov spoke after the Russian Strategic Missile Forces announced the test of a new intercontinental ballistic missile capable of carrying multiple independent warheads. He said Russia had also successfully tested a tactical cruise missile.
President Vladimir Putin and Ivanov, a former defense minister seen as a potential candidate to succeed Putin in elections next year, have repeatedly said Russia would continue to improve its nuclear weapons systems and respond to U.S. plans to deploy a missile defense system in Europe.
The ICBM, called the RS-24, was fired from a mobile launcher at the Plesetsk launch pad in northwestern Russia. Its test warhead landed on target some 5,500 kilometers (3,400 miles) away on the Far Eastern Kamchatka Peninsula, a statement from the Strategic Missile Forces said.
The new missile is seen as eventually replacing the aging RS-18s and RS-20s that are the backbone of the country's missile forces, the statement said. Those missiles are known in the West as the SS-19 Stiletto and the SS-18 Satan.
Ivanov said the missile was a new version of the Topol-M, first known as the SS-27 in the West, but one that that can carry multiple independent warheads, ITAR-Tass reported.
The first Topol-Ms were commissioned in 1997, but deployment has proceeded slower than planned because of a shortage of funds. Existing Topol-M missiles are capable of hitting targets more than 10,000 kilometers (6,000 miles) away.
The RS-24 "strengthens the capability of the attack groups of the Strategic Missile Forces by surmounting anti-missile defense systems, at the same time strengthening the potential for nuclear deterrence," the statement said.
The statement did not specify how many warheads the missile can carry.
The new missile would likely be more capable of penetrating missile defense systems than previous models, said Alexander Pikayev, an arms control expert and senior analyst at the Moscow-based Institute for World Economy and International Relations.
He said Russia had been working on a version of the Topol-M that could carry multiple warheads, and that its development was probably "inevitable" after the U.S. withdrew from the Soviet-era Anti-Ballistic Missile treaty in 2002, preventing the START-II treaty from coming into force.
Pikayev concurred with the missile forces statement that the RS-24 conforms with terms laid down in the START-I treaty, which is in force, and the 2002 Moscow Treaty, which calls for reductions in each country's nuclear arsenal to 1,700-2,000 warheads.
Alexander Golts, a respected military analyst with the Yezhenedelny Zhurnal online publication, expressed surprise at the announcement.
"It seems to be a brand new missile. It's either a decoy or something that has been developed in complete secrecy," he told The Associated Press.
The test comes at a time of increased tension between Russia and the West over missiles and other weapons issues.
Russia adamantly opposes U.S. efforts to deploy elements of a missile-defense system in Poland and the Czech Republic. The United States says the system is aimed at blocking possible attacks by countries such as North Korea and Iran, but Russia says the system would destroy the strategic balance of forces in Europe.
"We consider it harmful and dangerous to turn Europe into a powder keg," Putin said Tuesday, when asked at a news conference with Portuguese Prime Minister Jose Socrates about the controversy.
Russia, meanwhile, called Monday for an emergency conference next month on a key Soviet-era arms control treaty that has been a source of increasing friction between Moscow and NATO.
The call for a conference on the Conventional Forces in Europe Treaty follows last month's statement from Putin in which he declared a moratorium on observing Russia's obligations under the treaty.
The treaty, which limits the number of aircraft, tanks and other non-nuclear heavy weapons around Europe, was first signed in 1990 and then amended in 1999 to reflect changes since the Soviet breakup. Russia has ratified the amended version, but the United States and other NATO members have refused to do so until Moscow withdraws troops from the former Soviet republics of Moldova and Georgia — an issue Moscow says is unrelated.
Putin warned that Russia could dump the treaty altogether if Western nations refuse to ratify its amended version, and the Foreign Ministry said Monday that it lodged a formal request for a conference among treaty signatories in Vienna, Austria, on June 12-15.
Source: the International Herald Tribune - The Associated Press
Tuesday, May 29, 2007
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