mercredi 5 mars 2008

"Bien dans nos Converse"


"Chuck Taylor All Stars"

Elle a 100 ans, la petite basket qui monte, qui monte ! Depuis ses premiers pas, la Chuck Taylor All Star a essuyé bien des hauts et des bas. Aujourd’hui, elle est au mieux de sa forme. C’est même, pour ses millions d’adorateurs, l’accessoire qui fait tout.

Paru le 18.02.2008, par Peggy Frey

Ben Affleck les porte sans lacets. Charlotte Gainsbourg ne jure que par les blanches. Ines de la Fressange ne met que les basses. Et Mika, les hautes. À chacun sa Converse. Mais une chose est sûre : quand on les aime, c’est pour la vie. On parle même d’addiction. Car, les aficionados le savent bien, pas question de se limiter à une paire. La « Converse addict » est collectionneuse. Elle amasse. Elle conserve. Elle stocke. Ce n’est pas Christine, rédactrice de mode, qui dira le contraire.
« Je dois en avoir une bonne vingtaine. D’ailleurs, j’ai toujours ma première paire ! Elle est en toile noire, montante. On me l’avait rapportée des États-Unis; à l’époque, elles étaient introuvables en France. J’ai tout de suite adoré. Je les ai portées, portées et portées. Elles sont usées jusqu’à la corde, mais impossible de les jeter. C’était il y a vingt ans. »

Un vrai coup de foudre… qui dure. « Mes Converse, je les porte comme une paire de Louboutin. J’ai autant de plaisir à les afficher. » «Addict » aux Converse, O.K., mais pas n’importe lesquelles : « Je les choisis toujours en toile, montantes. Je ne jure que par les unies. J’ai trois couleurs de prédilection : crème, bleu foncé et noir. C’est comme ça ! » Christine est une puriste. Elle reste fidèle au modèle d’origine, immortalisé par le basketteur Chuck Taylor. Flash-back : au départ, la All Star est une basket de sport. Créée en 1908 dans le Massachusetts, l’entreprise sponsorise dans les années 20 la star montante du basket, Chuck Taylor. Entre deux matchs, il sillonne les États-Unis et fait connaître la marque. Le coffre de sa Cadillac est plein de la fameuse Canvas All Star. Il en distribue à tour de bras. Succès immédiat. Elle envahit d’abord les « parquets » américains, pour gagner ensuite la rue : « a star is born » ! Dans les années 50, elle est finalement baptisée la Chuck Taylor All Star.

À l’image du jean, la Converse est indétrônable

Depuis, elle a continué son ascension, avec des hauts et des bas, bien sûr. Mais la progression est continue. « Le nombre de paires vendues dans le monde à ce jour est proche du milliard, raconte Philippe Crônier, directeur commercial de Converse France. La récente mode pour le vintage et le denim a encore boosté les ventes. » Pourtant, Converse revient de loin. Malgré le succès phénoménal de la Chuck Taylor, l’entreprise a bien failli boire la tasse à plusieurs reprises. L’invasion de la basket ultra-hightech l’a fortement ébranlée, au point de frôler la fermeture.
Les fans étaient aux abois. À bout de souffle, la marque est finalement rachetée en 2003 par Nike. Depuis, c’est le bonheur ! « Que les accros se rassurent ! s’exclame Philippe Crônier, la Chuck Taylor ne disparaîtra jamais. Quelles que soient les modes, elle aura toujours ses fans, comme tous les accessoires mythiques. »

À l’image du jean, la Converse serait donc indétrônable. Bali Barret est d’accord. Créatrice de sa propre marque et directrice artistique du département Soie chez Hermès, elle est fan depuis toujours. « Pour moi, la Converse est comme une ballerine Repetto ou une botte cavalière. Elle est l’équivalent en chaussures d’un trench Burberry, d’une veste Chanel ou d’un carré Hermès : un grand classique. Un indémodable. Un accessoire à avoir dans sa penderie. C’est un des seuls éléments de mode qui décoincent l’allure d’une femme immédiatement. C’est l’essence même du chic décontracté. »
Sa première paire ? Le modèle en toile noire. « C’était la version haute. Je les ai tout de suite découpées aux ciseaux pour les transformer en basses. Je n’aime pas les hautes, je me sens ligotée, j’étouffe. Sans doute mon côté claustrophobe. » Sa touche perso ? « Je les porte comme des espadrilles et je les achète crème. Ensuite, je les repeins moi-même dans la couleur de mon choix. J’ai fait ça pendant des années. Aujourd’hui, je me suis un peu calmée. »

Car toutes les accros de Converse ont un point commun : ce succès planétaire les énerve ! « Avant, porter des Converse dénotait un certain état d’esprit, reprend Bali. La “Converse addict” avait un vrai style : à la Jane Birkin, elle était un chouia garçon manqué. Un peu rock. “Fashion” mais pas tendance. Gentiment rebelle. Aujourd’hui, ça n’est plus vrai : tout le monde en porte. C’est dommage ! » La Chuck Taylor, victime de son succès ? Ça ne risque pas, entre les Converse et ses fans, c’est à la vie à la mort ! La dame centenaire n’a donc aucun souci à se faire. Quant à la démocratisation de la All Star, Bali a son avis sur la question : « Ça prouve une chose : ce n’est pas le soulier qui fait le moine, c’est le style! » À méditer !

Converse, mode d'emploi

Pas si facile que ça à porter, les Chuck Taylor ! Quelques conseils de puristes pour éviter les « fashion » faux pas…
– La toile doit être unie. Une vraie « Converse addict » ne craquera jamais pour un modèle fantaisie à fleur ou camouflage. C’est ringard !
– On évite les couleurs trop flashy et on préfère le crème, le noir et le bleu marine. À la rigueur le bordeaux, qui apportera une note un peu rétro.
– Pas question de lacer les versions hautes jusqu’au dernier œillet. On s’arrête à l’avant-dernier.
– Avec une jupe, on évite de porter le modèle haut, à moins d’avoir de très jolies gambettes. Ça ne pardonne pas.
– Le bout en caoutchouc ne doit jamais être trop blanc. C’est d’un plouc ! On prend soin de le salir légèrement avant usage.
– Les versions cuir sont à éviter également. Les puristes, les vrais, ne portent que de la toile. Ne cherchez pas… c’est comme ça !

Source: le Figaro Madame
"Bien dans nos Converse"

le site web: http://www.converse.com/

dimanche 2 mars 2008

vendredi 29 février 2008

As gold price soars, a Korean custom suffers


By Su Hyun Lee
Thursday, February 28, 2008

SEOUL: Thirty-four years ago, each of the guests at Moon Sang Soo's first birthday party brought the customary baby present: a 24-karat gold ring.

When Moon was accepted to college, his parents had 20 of these rings, each weighing one don (3.75 grams, or an eighth of an ounce), melted down and recast as a miniature crown, which he now proudly displays in his living room.

But in December, at his own son's first birthday party, only half of Moon's 50 or so guests brought a ring. The others presented the baby with cash, slipping it into his parents' sleeves.

Gold is the traditional Korean gift to wish a baby good health and fortune in life, but with the world price of gold soaring to more than twice the level of just three years ago, that custom is breaking down. Guests at first birthday parties are resorting to alternatives. Some parents who do receive gold in their baby's name are even reselling it as soon as they can.

Gold has been a marker of many life passages in South Korea. Gifts of gold jewelry and watches used to be almost obligatory at weddings. Companies often awarded their employees with gold medals and gave them gold key chains when they retired. It was assumed that gold could be turned into cash in case of emergency.

As the country modernized, other items came into play as gifts. But the tradition of baby rings, valued not just for their monetary value but auspiciousness, has persisted. Most households have from 5 to 20 rings, or more, stashed away for each child, and resistance to selling them remains high.

"People gave us the rings to wish my children longevity," said Joo Sae Hoon, 37, a marketing director at an online bookstore who has two children, aged 7 and 11. "So I wouldn't feel comfortable cashing them in. Maybe I will have them made into necklaces when my children turn 20."

Attaining one's first birthday was a major cause for celebration when South Korea was poor and infant mortality rates were much higher. The gold rings were cherished as talismans safeguarding the children as they were growing up.

Moon said he preferred the gifts of gold to the cash at his son's birthday in December. The gold, he explained, was more likely to end up in his son's hands.

"It's less liquid than cash," he said. "So I can keep myself from spending it."

But the trend toward cash in place of rings seems likely to continue given rising gold prices, which in January surged past the 1980 record of $850 an ounce and are now hovering around $950. Rings that cost about 50,000 won, or $60 to $70, about three years ago have been priced at more than 100,000 won since the beginning of this year.

"A couple of months ago, I paid 95,000 won for a baby gold ring. I thought it was too expensive," said Lee Yon Jeong, a journalist.

Jewelers have been hit hard. According to the Korea Jewelry Association, sales of baby rings are down by half since the typical cost rose above 100,000 won.

"Customers keep coming in to buy baby rings," said Yoon Jae Hee, owner of Kobo Jewelry in central Seoul. "But once they find out that they cost 130,000 won, they hesitate."

"They might buy a ring half the standard size," he said. "Or they resort to cheaper accessories."

Gold jewelers have been trying to lure customers with lightweight baby necklaces or bracelets with bells - supposed to prevent a baby from going missing.

And several jewelers say that now more people are selling gold than buying it.

People have been bringing in graduation rings, lucky charms, key chains, mismatched earrings. A few have even started selling their baby's gold rings.

"The other day a woman pushing a child in a stroller sold us three," Yoon said. "As she did so, she murmured, 'Sorry, son.' "

He said he gave the woman 91,000 won for each ring.

Still, Cha Min Gyu, public relations manager of the Korea Jewelry Association, said he doubts the custom of giving babies gold rings will disappear completely.

"Families will never give up gold rings for their own precious children," Cha said. "In Korea, gold will always be a symbol of health, wealth and prosperity."

Judging by the current level of baby ring production, Cha said he believes that about 40 percent of guests are still bringing gold rings to first-birthday parties. "Otherwise the baby ring jewelers would be out of business by now," he said.

Moon, who received a crown made from his gold baby rings when he was accepted to college, says that once his own son reaches that point, he'll sell the 27 rings presented to his son in December to pay the first semester's tuition.

"For the rest of his higher education," Moon said, "he can support himself."

Source: iht.com
As gold price soars, a Korean custom suffers

lundi 25 février 2008

WAMP – Holland Hungarian Design Festival




Hi there!

I know it’s been a long time I’ve not posted any thing.
It is mostly due to no internet connection at home as well as… ok… I can say that…. too much work (I can hear you laugh).
Any way

So… I’ve decided to come up with a design topic and the so called “WAMP”.
What’s WAMP? WAMP is the Hungarian Design market located in Budapest. Almost every month, an exhibition is organized based on a different theme.
This month, WAMP started from Feb’ 22 to 24 and has been completely bolded to the Netherlands colors!

Who says NL says…
- Rembrandt… no
- Weed… neither
- Red Light District… hum… yeah… but here no.
Rem Koolhaas and Gerrit Rietveld .To be posted soon.

I’ve been there (takin’ place in the Godor club) and I find some interesting stuff.
Take a look on the following ones (click on their name to go to the website):
- Maarten Baptist & Jan Habraken : http://www.watdesign.nl/
- Jurgen Bey: http://www.jurgenbey.nl/
- Ineke Hans: http://www.inekehans.com/
- Richard Hutten: http://www.richardhutten.com/
- Lambert Kamps: http://www.lambertkamps.com/
- Joris Laarman: http://www.jorislaarman.com/
- Sander Mulder: http://www.sandermulder.com/
- Bertjan Pot: http://www.bertjanpot.nl/
- Maartje Steenkamp: http://www.maartjesteenkamp.nl/index3.html
- Studio Parade: http://www.studioparade.nl/
- Laurens Van Wieringen: http://www.laurensvanwieringen.nl/
- Gaia broches: www.meckyvandenbrink.com

More information on www.wamp.hu
And www.newdutchdesign.info

mercredi 23 janvier 2008

Tata : un siècle d'intuitions



LE MONDE | 22.01.08 | 12h44 • Mis à jour le 22.01.08 | 13h49

chaque génération, sa révolution. A 70 ans, Ratan Tata vient de faire la sienne : la Tata Nano, la voiture la moins chère du monde, dont la version de base sera vendue 1 700 euros en Inde à partir de septembre. Au début du XXe siècle, son arrière-grand-père, Jamsetji Tata, fondateur du groupe, avait fait construire la première aciérie du pays. En 1932, son petit cousin J. R. D. Tata avait fondé la première compagnie aérienne du pays, la future Air India.


"Un Tata est par définition un pionnier", résume, à Bombay, Gita Piramal, spécialiste de l'histoire des entreprises. Plus surprenant, les grandes réussites de ce groupe fondé en 1869 échappent à la seule logique industrielle. Jamsetji Tata impulse la création de la première aciérie indienne, qui sera construite en 1909 ? C'est pour créer les conditions économiques de l'indépendance de l'Inde, cinquante ans avant le départ des Britanniques. J. R. D. Tata effectue son premier vol à Karachi en 1929 ? Il veut répéter les exploits de Louis Blériot, qu'il voyait atterrir près de chez lui, en France - il y a passé toute son enfance, sa mère était française.

En 2003, lorsque Ratan Tata annonce la fabrication de la future Tata Nano, il pense à la "voiture du peuple" du XXIe siècle. Celle des pays émergents. "Personne n'y croyait", reconnaît Sylvain Bilaine, le directeur général de Renault en Inde. De l'aveu même de Ratan Tata, le prix du véhicule a été annoncé sans qu'aucune étude de faisabilité n'ait été effectuée. Simple improvisation, en réponse à la question d'un journaliste au Salon de l'automobile de Genève. Mais peu importe. "Une fois que l'on se fixe des objectifs, on parvient toujours à les réaliser", justifie le patron du groupe. Pendant quatre ans, 500 ingénieurs vont concevoir la voiture. Chaque pièce est étudiée et réinventée, en reprenant tout de zéro. Jusqu'à s'inspirer des carnets d'études de Léonard de Vinci pour mettre au point le système de transmission de vitesses.

Chez Tata, l'innovation passe par l'obstination. Un trait de caractère hérité du fondateur, Jamsetji Tata. En 1869, le jeune homme, âgé de 30 ans, issu d'une famille de prêtres parsis (une minorité zoroastrienne qui a fui l'Iran au VIIIe siècle), convertit une huilerie en faillite de Bombay en filature de coton. Il y introduit, bien avant les pays industrialisés, l'utilisation de la tige de broche, découverte lors d'un voyage en Amérique du Nord. Lorsqu'il crée un deuxième site de production, son calcul est simple : celui-ci doit être situé près des champs de coton, d'une gare ferroviaire, et bénéficier de ressources importantes en eau. Ce sera Nagpur, à 900 km de Bombay. L'entreprise Tata prend de l'importance. Jamsetji décide de changer de méthode de gestion. Dorénavant, le directeur général rapporte au conseil d'administration. Le concept, devenu si populaire, de gouvernance d'entreprise, est né.

"La capacité à atteindre la liberté provient de l'industrialisation, ainsi que de l'infusion de la science moderne et de la technologie dans la vie économique du pays", écrivait Jamsetji Tata dans ses mémoires. Le fondateur du groupe industriel s'engage pour l'indépendance de l'Inde dès les origines du Parti du Congrès. Il consacre du temps et de l'argent à l'Association de la présidence de Bombay, la structure centrale du parti de l'indépendance. Pourtant, Jamsetji ne prendra jamais la parole dans des réunions politiques. Il préfère construire, dans la discrétion, les infrastructures qui mèneront l'Inde à l'indépendance. "La force, derrière ses projets, consistait à repousser les frontières industrielles de l'Inde, plutôt qu'à réaliser des profits", explique Dwijendra Tripathi, ancien professeur à l'Institut indien de management d'Ahmedabad.

Son grand projet est la construction de la première aciérie du pays. Il parcourt le pays pendant vingt-huit ans à la recherche du site idéal. Il se rend également au Royaume-Uni, avec l'idée de faire mieux que les Britanniques. Dans une lettre écrite à son fils peu avant sa mort, Jamsetji Tata décrit la ville idéale : "Assure-toi qu'il y ait beaucoup d'espace pour les pelouses et les jardins. Réserve de vastes zones pour le football, le hockey et les parcs. Prévois des emplacements pour les temples hindous, les mosquées et les églises chrétiennes." Neuf ans après la mort de Jamsetji Tata, Jamshedpur est construite, dans le nord-est de l'Inde. Aux quatre coins de la ville, la statue de bronze du fondateur veille encore sur les habitants.

Jamshedpur est devenue le laboratoire social et la capitale de l'empire industriel Tata. Le groupe instaure la journée de travail de huit heures en 1912, le congé maternité en 1928, l'intéressement des salariés aux profits de l'entreprise dès 1934. Une révolution pour l'époque. "Aujourd'hui encore, la responsabilité sociale du groupe Tata représente le modèle à suivre pour la plupart des entreprises étrangères qui s'implantent en Inde", assure Damien Krichewsky, auteur d'une thèse sur la responsabilité sociale des multinationales implantées dans le pays.

A la mort de Jamsetji Tata, les deux tiers du capital de l'entreprise sont transmis à des oeuvres philanthropiques et des fondations, dont le Tata Institute of Technology, à Bangalore, qui formera de nombreux Prix Nobel. Ce qui est bon pour Tata est bon pour l'Inde. Le destin de Tata va se confondre avec celui du pays.

Un siècle plus tard, l'entreprise donne à l'Inde l'occasion de prendre sa revanche sur son passé colonial. En 2000, le groupe rachète Tetley pour 296 millions d'euros. Le géant du thé britannique a bâti sa fortune sur la découverte, en 1835, du Camellia sinensis, une variété de thé originaire des plaines du nord-est de l'Inde. En 2006, le chancelier britannique, Gordon Brown, nomme Ratan Tata membre fondateur du Conseil consultatif pour les affaires économiques internationales. En 2007, la sidérurgie britannique passe sous giron indien : Tata rachète pour 9,6 milliards d'euros l'anglo-néerlandais Corus. Les quotidiens célèbrent l'événement en imprimant en manchette cette phrase prêtée à Frederick Upcott, le haut-commissaire au réseau ferré indien lors de la colonisation britannique : "Je mangerai chaque kilo d'acier que Tata produira."

Le 3 janvier, le groupe Ford a désigné Tata comme le repreneur favori pour ses deux fleurons britanniques Jaguar et Rover. L'Inde savoure sa revanche. Le groupe Tata a abandonné la cause du nationalisme pour celle de la globalisation. Une question de survie. Ratan Tata a pris les rênes du groupe familial en 1991, au moment où le premier ministre, Narasimha Rao, engageait les premières réformes de libéralisation de l'économie. Le groupe est alors fragmenté, affaibli par cinquante années d'économie contrôlée par l'Etat. Pour résister à la nouvelle concurrence venue de l'étranger, il doit gagner une stature mondiale.

Ratan Tata n'a pas d'autre choix que de concentrer ses forces sur un nombre restreint d'activités stratégiques. Il vend des participations dans les secteurs des cosmétiques, de la construction, pour tout réinvestir dans l'automobile, la sidérurgie, le thé et les nouvelles technologies. Pari réussi. Le dinosaure indien devient en quelques années un groupe international.

Entre 2003 et 2007, le chiffre d'affaires du groupe a doublé, pour atteindre 28,8 milliards de dollars. Le tiers des revenus provient désormais de l'étranger. Tata (290 000 personnes employées dans 85 pays) est aujourd'hui l'actionnaire majoritaire de VSNL, le leader mondial du transport de la voix et des données, et possède Tata Consultancy Services, le premier exportateur indien de services informatiques, qui compte sept des dix plus grandes entreprises américaines parmi ses clients.

Ce virage vers l'international ne semble pas bousculer les habitudes du groupe. "Quand on a l'habitude de travailler dans un pays d'une telle diversité culturelle, l'international ne pose pas de problème. Il est déjà dans nos gènes", constate Jenny Shah, responsable de la communication de Tata Steel. La capitalisation des dix-huit entreprises du groupe cotées en Bourse a quintuplé depuis 2003.

Mais, derrière les chiffres à succès, la culture du groupe familial s'effrite. Ratan Tata le reconnaît bien volontiers : "Il y a trente ans, lorsqu'un employé était embauché chez Tata, il pouvait espérer y rester toute sa vie. Le monde a changé. Nous avons besoin d'être plus exigeants vis-à-vis des salariés. Ils doivent être à la recherche d'opportunités sur leur chemin professionnel." Même à Jamshedpur, la capitale de l'empire industriel, les temps ont changé. Les slogans "Volonté de travailler, volonté de gagner", inscrits à l'entrée des usines, prennent la rouille. Sur les 700 000 habitants, seuls 20 000 travaillent encore dans les usines Tata. Des voix s'élèvent pour réclamer la démocratie. "Derrière l'hôpital Tata, 8 000 habitants vivent dans la misère avec un robinet pour tout le quartier. Il est temps qu'une mairie remplace l'entreprise à la tête de la ville", s'impatiente Jawahar Lal Sharma, un ancien militant des droits de l'homme en retraite.

Dans la gestion du groupe, le paternalisme d'antan cède la place à un management décentralisé, comme pour préparer la fin de la dynastie. Ratan sera probablement le dernier de la famille à diriger l'entreprise. Célibataire sans enfants, il pourrait jeter son dévolu sur un manager aguerri à la mondialisation. Le groupe ne rêve plus d'indépendance. Il veut conquérir le monde.

lemonde.fr
Julien Bouissou
Article paru dans l'édition du 23.01.08